mercredi 30 janvier 2013

L'hymne à l'amour


Lire I Corinthiens 12,31 – 13,13


Je ne peux lire cet hymne à l’amour, un des plus beaux passages de la Bible, sans penser à la première encyclique de Benoît XVI, Deus caritas est (Dieu est amour). Dans cette lettre adressée à tous les membres de l’Église, le Pape rappelle que les anciens Grecs avaient plusieurs expressions que nous traduisons par le seul mot amour. Ils disaient storgè pour l’affection qu’on retrouve dans des groupes restreints comme la famille. Ils disaient philia pour la relation spéciale entre deux amis fidèles. Ils disaient eros pour l’amour passionnel qui prend corps dans le langage sexuel. Ils disaient agapè pour l’amour qui se donne sans mesure à l’être aimé.

Le Pape cherche surtout à comprendre la différence et la relation entre eros et agapè, une question qui devrait tous nous préoccuper. En effet, notre société semble faire de l’amour passionnel une idole: selon les films, la musique et les romans populaires, toute la vie trouverait sa valeur dans ce genre de passion où l’on perd le tête, où règne la sensualité, où la morale n’a plus de place. Seuls compteraient l’émotion forte, le plaisir sensuel et la possession de l’autre.

Benoît XVI nous aide à comprendre que ce genre d’amour, s’il est typiquement humain, peut aussi être déshumanisant. Car il réduit l’autre à une seule dimension, il en fait une simple projection de mes désirs. Et il me réduit à mes seules émotions, qui sont changeantes et instables. Je deviens esclave de mes pulsions.

Ce n’est que dans la conversion de l’ eros par l’agapè que nous devenons vraiment humain. Lorsque la passion se fait don, lorsque le désir se fait sacrifice, lorsque le bonheur de l’autre passe avant le mien, l’amour devient non seulement une expérience humaine, mais un processus humanisant.

Dans ce passage de la première lettre aux Corinthiens, Paul célèbre cet « amour - agapè » qui doit régner entre les membres d’une communauté chrétienne, car il reflète l’amour de Dieu pour nous, amour qui a pris chair dans la personne de Jésus-Christ.

Reprenons cet hymne à l’amour, méditons-la, cherchons à la vivre dans nos relations avec les personnes qui nous entourent. Nous grandirons en humanité. Nous deviendrons semblables à Dieu.

mercredi 23 janvier 2013

De l'appendicite à la résurrection


Lire I Corinthiens 12, 12-30

Le texte de ce dimanche nous présente un passage bien connu de saint Paul où il établit une comparaison entre le corps humain et la communauté chrétienne. De même que la diversité des membres du corps humain n’empêche pas son unité, ainsi la diversité des membres de la communauté chrétienne ne devrait pas être un obstacle à l’harmonie, à la fraternité, à la communion qui devrait la caractériser.

Une telle comparaison n’était pas nouvelle à l’époque : d’autres auteurs avaient déjà utilisé la métaphore du corps pour expliquer qu’une société, tout en étant composée de divers membres, demeure unie en autant que ses membres collaborent. Mais Paul trouve la source de cette l’unité chrétienne dans la relation personnelle qu’entretient chaque membre de la communauté avec le Christ.

C’est ce qui permet de comprendre ce verset, à prime abord un peu déroutant: «Si un membre (du corps) souffre, tous les membres partagent sa souffrance; si un membre est à l’honneur, tous partagent sa joie. »

Je comprends bien la première partie de ce verset. Je n’ai qu’à me rappeler ma crise d’appendicite lorsque j’avais dix-neuf ans. L’infection d’un petit bout d’intestin avait réussi à m’arrêter complètement. Je ne pouvais ni marcher, ni manger. Je ne pouvais pas penser. Je ne pouvais même pas dormir. Oui, la souffrance d’un membre du corps peut faire souffrir tout le corps.

Mais la deuxième partie du verset demeure énigmatique. Que veut dire Paul quand il parle d’un membre du corps qui est « à l’honneur? » Il est évident qu’il ne parle plus ici du corps humain, mais du corps social que forment les chrétiens. Encore plus, il parle du corps mystique que nous formons en Jésus. Et le membre qui est « à l’honneur, » c’est justement Jésus, lui qui est ressuscité dans la gloire et qui règne à la droite du Père. Tous les membres du corps, c’est-à-dire nous-mêmes, les frères et sœurs de Jésus, nous partageons déjà sa gloire de ressuscité.

On comprend alors que même la première partie de ce verset concerne aussi le Christ. En effet, c’est lui qui a souffert la passion et la croix. Et en lui, nous aussi nous souffrons, car nous sommes crucifiés avec lui, avec lui nous mourons au mal et au péché.

Cette conviction, qu’en Jésus tous les membres de la communauté sont profondément unis, s’avère le fondement solide de l’amour qui doit régner entre nous. Rappelons-nous que tout ce qui blesse cette unité blesse notre relation au Christ. Réjouissons-nous lorsque l’unité grandit entre nous : elle est un reflet de notre relation intime avec le Christ.

jeudi 17 janvier 2013

Diverses facettes, un diamant


Lire I Corinthiens 12, 4-11

En ces premières semaines du temps ordinaire, nous lisons la première lettre aux Corinthiens. Les nombreux habitants de la ville de Corinthes en Grèce étaient habitués à la diversité : les très riches vivaient à côté des très pauvres, militaires, marins et commerçants se fréquentaient, les religions et les langues du monde se croisaient dans ce port de mer très achalandé.

Oui, ils connaissaient la diversité, mais c’était une diversité qui menait à la création de nombreuses factions, des « cliques » comme on dit souvent. C’était groupe contre groupe, famille contre famille. « Ma nationalité est meilleure. Ma religion est la bonne. Mon patois est juste alors que toi, tu parles avec un accent. » Ce qu’ils ne réussissaient pas à reconnaître, c’était l’humanité commune qui les unissait au-delà de cette diversité.

La petite communauté chrétienne que Saint Paul fonda à Corinthes a connu ces mêmes divisions, ces mêmes factions. Il a dû se donner beaucoup de peine pour garder l’unité dans cette communauté. Toutes sortes de raisons pouvaient mener à une dispute : qui avait baptisé qui? lequel parlait mieux? avec qui pouvait-on partager un repas?

Un autre sujet de division, c’était les dons que l’Esprit faisait jaillir au cœur de la communauté. Certains recevaient des paroles inspirées, d’autres avaient des pouvoirs de guérison, d’autres étaient remarqués pour leur sagesse, d’autres jouissaient de l’habileté de chanter les louanges du Seigneur. Et plutôt que de se réjouir de tous ces dons, ils se disputaient à savoir lequel était meilleur, lequel était plus important.

Paul leur rappelle que tous ces dons viennent d’une seule et même source : l’Esprit de Dieu. Et il leur rappelle que ces dons leur sont donnés pour le bien de la communauté, non pas pour la diviser!

On peut s’étonner de cette vanité des Corinthiens, de cet appétit de toujours passer en tête et de se faire valoir. Pourtant, sommes-nous si différents? N’avons-nous pas l’habitude de nous comparer aux autres, de nous faire valoir aux yeux des autres? N’avons-nous pas l’habitude de remarquer les différences plutôt que les ressemblances : différences de culture, de race, de religion, de statut social?

Pourtant, nous sommes tous faits de la même pâte humaine. Nous sommes tous pétris par les mêmes forces de l’histoire. Nous vivons tous sur le même petit globe terrestre.

L’Esprit veut nous faire découvrir notre unité profonde, au-delà de nos différences. Les talents que nous avons, nos richesses, nos habiletés, elles nous sont données pour le bien de tous. Pourquoi ne pas les partager? Pourquoi ne pas reconnaître en chaque être humain un frère, une sœur?

mercredi 9 janvier 2013

L'Esprit du baptême

Lire Actes des Apôtres 10, 34-38

L’événement que raconte le texte d’aujourd’hui se situe à un point tournant de l’histoire de la jeune Église. En effet, la Pentecôte a eu lieu, la première communauté s’est formée à Jérusalem, une première persécution s’est déclenchée contre les chrétiens – où Étienne trouva la mort, – Paul s’est converti : et voilà que Pierre se fait appelé chez un centurion romain, un nommé Corneille, pour l’éclairer au sujet de Jésus.

Pourquoi cet événement est-il si important ? C’est que les premiers chrétiens se demandaient si on pouvait accueillir des non-juifs dans l’Église. Jésus avait été juif, de même que les apôtres. Tous les membres de la première communauté étaient juifs. L’Évangile ne serait-il pas seulement pour les Juifs ?

Or, voilà que ce romain, un païen, veut entendre parler de Jésus. Pierre hésite, mais enfin s’y rend. Il commence à raconter l’histoire telle qu’il la connaît, commençant au commencement, c’est-à-dire, au baptême de Jésus lorsque celui fut rempli de l’Esprit-Saint. Et voilà que, quelques instants plus tard, Corneille et ses amis sont eux aussi remplis de l’Esprit-Saint et, tout comme les apôtres à la Pentecôte, ils se mettent à prophétiser et à parler en langues.

Ce même Esprit qui reposa sur Jésus lors de son baptême, ce même Esprit qui transforma les apôtres lors de la Pentecôte, ce même Esprit qui surprit Corneille et ses amis avant même qu’ils aient été baptisés, cet Esprit-là est actif encore aujourd’hui en notre monde, en nous !

Pierre explique à Corneille que c’est dans la puissance de l’Esprit que Jésus passait en faisant le bien et qu’il guérissait les personnes esclaves du mal. C’est dans et par l’Esprit que le Père et le Fils s’aiment.

Ce même Esprit nous est donné pour que nous puissions nous aussi faire le bien, panser les blessures et guérir les cœurs. Ce même Esprit nous est donné pour que nous puissions découvrir Dieu tout proche de nous, dans nos maisons comme sur nos routes, dans nos assemblées comme dans nos solitudes.

Le mot christ veut dire en grec « celui qui a reçut l’onction. » Jésus, à son baptême, a été oint de l’Esprit-Saint. À partir de ce moment-là, il reçoit le titre de Christ. Nous, qui portons le nom de « chrétien », nous sommes des « christ-iens, » des hommes et des femmes qui, comme Jésus, sommes oints de l’Esprit. Vivons donc de cet Esprit comme Jésus l’a fait, et comme lui, passons en faisant le bien et en demeurant dans l’intimité de Dieu.