jeudi 25 avril 2013

"Je fais toutes choses neuves!"


Lire Apocalypse 21, 1-5

Il nous arrive tous de vouloir recommencer à zéro, d’avoir une nouvelle chance, de nous reprendre en oubliant le passé. Une relation a été blessée, un projet a été mal amorcé, une occasion nous a glissé entre les mains, et nous voilà pris entre deux sentiments : le regret de ne pas avoir su profiter du moment et le désir de reprendre la chance perdue.

N’est-ce pas un peu ce qui se cache derrière toutes ses résolutions parsemées au fil de nos vies? Que ce soit au jour de l’an ou lors de notre anniversaire de naissance, que ce soit lors d’une promotion ou au moment d’une nouvelle rencontre, on se promet qu’on va faire du neuf, que ça sera différent, cette fois.

Non pas qu’on voudrait tout détruire de ce que nous sommes. Nous avons tous certaines qualités, certains talents. Il y a des aspects de nous-mêmes que nous apprécions. Mais nous reconnaissons que tel défaut, telle limite vient brouiller les cartes et nous empêchent d’être tout ce que nous pourrions être.

Dans le rêve que saint Jean nous rapporte dans son Apocalypse, la mer est le symbole de ce qui en nous, et autour de nous, vient brouiller nos cartes. La mer, c’est ce qui ne se contrôle pas, la surprise de l’imprévu, l’énergie négative du chaos. « Alors, j’ai vu un ciel nouveau et une terre nouvelle, » nous dit saint Jean, « et il n’y avait plus de mer. »

Imaginez, un monde d’où toutes ces forces négatives seraient bannies, un univers où je pourrais être vraiment moi-même, où mes talents, mes vertus et mes habiletés auraient libre cours. Imaginez, un monde où chaque personne pourrait ainsi devenir tout ce qu’elle est appelée à être, où la beauté, la vérité et la liberté pourraient vraiment rayonner.


Voilà le monde, nous dit saint Jean, qui est en train de naître sous la poussée de l’Esprit Saint. C’est le monde qui s’épanouit au-delà de la mort. C’est le monde d’un Dieu qui fait « toutes choses neuves, » un monde où la mort n’existe plus. 

Croire en Dieu, c’est croire en la possibilité d'un tel monde. Et croire en un tel monde, c’est s’engager à le construire ici et maintenant, en nous et autour de nous. La foi nous ouvre des possibilités inespérées. Il suffit d’y croire.

mercredi 17 avril 2013

Le sang et l'eau, la tente et le Temple


Lire Apocalypse 7, 9-17

La fête des tentes - Sukkot - était l'une des trois fêtes annuelles que le peuple juif marquait par un pèlerinage au Temple de Jérusalem. Là, ils construisaient des huttes en mémoire des quarante ans d'errance dans le désert avant l'entrée en terre promise. Là, ils puisaient l'eau de la citerne de Shilo'ach afin d'en laver l'autel et les parvis du Temple, se souvenant de l'eau que Dieu avait fait jaillir du rocher dans le désert. Là, ils organisaient de grandes processions autour du Temple, tenant des rameaux dans leurs mains, invoquant le salut de Dieu. Zacharie avait prophétisé que dans les jours du Messie des peuples de toutes nations et de tous pays viendraient célébrer Sukkot à Jérusalem afin de se réjouir dans les oeuvres merveilleuses de Dieu.

L'extrait du livre de l'Apocalypse que nous lisons aujourd'hui reprend ces symboles. Dans le rêve visionnaire de Jean, la prophétie de Zacharie se réalise alors que des peuples de toutes nations, langues et races se rassemblent autour du Temple, tenant en main des rameaux, non plus pour invoquer le salut divin mais pour louer le salut déjà accompli.

Qui sont-ils? Une voix le révèle : c’est l’assemblée des martyrs, de ceux et celles qui sont morts à cause de leur foi en Jésus. N’oublions pas que le livre de l’Apocalypse a été écrit à une époque où chrétiens et chrétiennes étaient persécutés par l’empire romain. Tous étaient censés adorer l’empereur comme un dieu, mais les membres de la jeune Église refusaient de le faire. Ce refus entraînait souvent leur mort. Mais en mourant avec Jésus, ils découvraient une vie nouvelle. Dans le sang du Christ, ils sont lavés de toute souillure. (Ce n'est que dans un rêve comme celui-ci que le sang peut rendre blancs des vêtements salis!)


Jean reprend des expressions des psaumes 23 et 121, psaumes de pèlerinage, pour redire comment Dieu prend soin de ce peuple qui doit traverser, non plus un désert, mais la mort elle-même pour arriver à la terre promise qu’est le ciel. « Ils n’auront plus faim, ils n’auront plus soif, le soleil ne les accablera plus, Dieu les fera habiter sa propre tente. » Plus besoin de construire de huttes, Dieu nous accueille dans la sienne!

Et l’image la plus saisissante : « L’Agneau sera leur berger pour les conduire vers les eaux de la source de vie. » Voilà un message d’espérance et de réconfort pour des croyants persécutés à cause de leur foi. Ils découvrent qu’ils revivent de façon encore plus radicale ce que le peuple juif avait vécu. Et le Dieu qui avait été fidèle autrefois se révèle toujours fidèle. Au-delà des épreuves, une promesse donne courage : « Il essuiera toute larme de leurs yeux. » Cette promesse, elle vaut aussi pour nous, aujourd’hui.

mercredi 10 avril 2013

L'agneau égorgé, toujours vivant!


Lire Apocalypse 5, 11-14

Il arrive dans nos rêves que des éléments contraires se conjuguent pour créer des effets qui nous désorientent. Je rêve que je suis dans les ténèbres, mais je peux aussi voir ce qui se passe. Je rêve que je me vois en train d’agir, mais en même temps, je ressens intérieurement ce qui m’arrive. Je rêve d’une personne qui est toute jeune, mais elle aussi très vieille. Ce qui est impossible dans la vraie vie devient possible dans les rêves.

Dans le rêve qu’il nous rapporte, saint Jean nous présente une telle figure contradictoire : un agneau égorgé qui se tient debout, vivant. Cet agneau a donc été tué en sacrifice, comme on le faisait au Temple de Jérusalem. Mais il est toujours vivant et se tient debout, en position de marche. Il est plein de vie; pourtant, il est mort.

Il se tient devant le trône où est assis « quelqu’un. » Autour du trône, il y a vingt-quatre anciens, des chefs de communautés. Il y avait vingt-quatre classes de prêtres dans l’Ancien Testament : le chiffre vient-il de là?

Devant le trône se trouvent quatre êtres qui ressemblent à des animaux : un lion, un jeune taureau, un aigle en plein vol, le quatrième ayant une face humaine. Chaque être a six ailes, recouvertes d’yeux : ils voient tout ce qui se passe. Représentent-ils tous les êtres vivants de la création?

Et voilà que des millions de millions d’anges se joignent aux anciens et aux quatre animaux pour proclamer la louange de l’agneau immolé. Encore plus, toutes les voix de l’univers, toutes les créatures « au ciel, sur terre, sous terre et sur mer, » se mettent à louer l’agneau et celui qui siège sur le trône.

Quelle scène majestueuse : une liturgie universelle où l’adoration se mêle à la louange, où le chant se marie à la poésie. Cette liturgie, à qui s’adresse-t-elle? À celui qui siège sur le trône, c’est-à-dire à Dieu, Seigneur et créateur de l’univers. Et à l’agneau immolé vivant, c’est-à-dire au Christ ressuscité, Seigneur et sauveur de l’humanité.

Ce rêve nous apprend que nos petites liturgies humaines sont liées à une réalité qui nous dépasse infiniment. Nos églises sont un reflet du ciel lui-même. Nos cantiques religieux sont des échos des chants des anges. Nos assemblées représentent l’immense masse des êtres qui, à travers l’univers entier, trouvent leur vie en Dieu et en son Messie.

Nous sommes déjà pris par le même mystère, nous sommes épris du même amour. Le ciel se glisse sur la terre et l’éternité est déjà commencée. Nos petites liturgies sont plus grandes que nous ne pouvons l’imaginer.

mercredi 3 avril 2013

Des rêves à la réalité


 

Lire Apocalypse 1, 9-19


Pour beaucoup d’entre nous, le livre de l’Apocalypse demeure le texte le plus mystérieux de la Bible. Il est rempli de symboles étranges, d’images fantastiques, de scènes épeurantes, de poèmes exubérants. Il semble parler de l’avenir. Pourtant, il parle au présent.

Le mot apocalypse vient du grec et veut dire ‘enlever le voile.’ Le voile, c’est ce qui nous empêche de comprendre le sens profond des événements qui nous entourent. C’est comme si nous étions aveugles : quelqu’un doit enlever le bandeau qui nous empêche de voir clairement. C’est ce que se propose de faire saint Jean, l’auteur de ce livre. Mais il le fait d’une drôle de façon, non pas avec des explications claires et des propos raisonnés, mais avec des images tirées du monde des rêves et des cauchemars.

Cette façon de faire n’était pas étrange pour les lecteurs et les lectrices du premier siècle, époque à laquelle il fut écrit. Ce genre littéraire, ce style d’écriture était populaire à l’époque. De nombreux auteurs s’en servaient pour faire passer leurs messages. Mais pour nous, habitués que nous sommes au style plus direct des reportages de journaux et aux genres littéraires de l’histoire et de la philosophie, ce langage est très peu familier.

Le danger, c’est justement de penser qu’il s’agit d’un reportage ou d’un texte historique. Il y a tout un défi pour nous à percer ce langage symbolique. Mais grâce à ce travail de réflexion et d’interprétation,  nous pourrons arriver à saisir le message de l’auteur, message qui en est un d’espérance et de courage au cœur de la détresse et de la persécution.

Les premiers versets de ce livre nous présentent la figure centrale du texte : c’est le Christ ressuscité, celui qui règne sur l’univers, même si son règne est caché pour le moment. Un des buts de l’auteur, c’est justement de nous aider à voir, au-delà des apparences, que le Christ est déjà maître de l’histoire.

Dans un rêve, l’auteur voit le Christ. Et comme dans tout rêve, les images sont à la fois frappantes et imprécises. Le Christ porte une tunique, comme un prêtre dans une liturgie. Sa ceinture est dorée, couleur de la royauté. Il est éclatant de lumière, comme lors de la transfiguration. Ses pieds sont de bronze précieux, comme une statue solide, immuable. Sa voix est immense, signe de son pouvoir. Il tient sept étoiles dans sa main, symbole des sept églises à qui est adressé le texte. Une épée à deux tranchants sort de sa bouche : cela représente sa parole qui tranche au cœur de mensonge et qui touche nos cœurs.

Il déclare : ‘Je suis l’alpha et l’oméga.’ première et la dernière lettres de l’alphabet grec. Il est le commencement et la fin de tout : de l’histoire du monde, et de l’histoire de chacune de nos vies. Tout le reste du texte cherchera à nous aider à comprendre que le Christ ressuscité est vraiment le Seigneur qui est présent au cœur du monde et qui nous accompagne jusqu’à la gloire de notre propre résurrection. Voilà un message d’espérance pour un monde qui désespère. Au fil des semaines à venir, nous continuerons à décoder ce beau livre.