Lire Philippiens 2,6-11
Nous connaissons le livre des psaumes: un des livres de l’Ancien Testament, il contient cent cinquante poèmes à la gloire de Dieu. Ils avaient été rédigés au fil des siècles et collectionnés pour en un faire un recueil à peu près cinq cents ans avant Jésus-Christ. Ces poèmes nourrissaient la prière quotidienne des Juifs. Jésus et ses apôtres les ont souvent priés.
Les premiers chrétiens, venus du judaïsme, continuèrent à se servir de ces poèmes dans leur liturgie et leur prière quotidienne. Mais ils ont aussi composé de nouveaux poèmes afin de glorifier Dieu à cause de Jésus-Christ. Pour les distinguer des psaumes, on les appelle des cantiques. Plusieurs d’entre eux sont cités dans les lettres de Paul. La deuxième lecture de ce dimanche des Rameaux nous en présente justement un.
Ce cantique a comme sujet principal la vie de Jésus, qu’il présente en deux mouvements : un premier mouvement descendant, commençant par la venue de Jésus au monde et s'achevant par sa mort sur la croix; et un second mouvement ascendant, qui comprend la résurrection et la glorification de Jésus. Pourquoi la vie terrestre de Jésus est-elle ainsi comprise comme un mouvement de descente? Parce que Jésus s’abaisse : il s’abaisse en devant humain, en se faisant pauvre et serviteur, en allant jusqu'à la mort. Et même la forme de sa mort est humiliante, car il est crucifié comme un meurtrier. Le cantique se sert d’un mot grec pour exprimer cette idée, kénosis. C’est un mot difficile à traduire : il évoque l’image de quelque chose qui se vide de son contenu, qui s’appauvrit en se répandant. C’est l’image centrale du cantique : Jésus se vide de sa gloire et de sa puissance, il s’appauvrit radicalement en répandant son sang sur la Croix.
Mais ce mouvement descendant n’est que le prélude à un mouvement ascendant. Un peu comme une athlète s’élève d’autant plus haut sur le tremplin qu’elle a réussi à s’enfoncer dans la toile, Jésus est élevé à un niveau qui dépasse de toute proportion son abaissement. Cette élévation dans la gloire découvre le sens profond de son abaissement : il semblait que Jésus s’était vidé sur la croix, mais il n’avait fait qu’ouvrir un espace pour l’Esprit de son Père. Son appauvrissement était plutôt un enrichissement : d’abord pour nous qui sommes sauvés; ensuite pour le monde qui reconnaît comme Seigneur; enfin pour Jésus lui-même qui est élevé au-dessus de tout.
Le signe de cette élévation, c’est le nouveau nom qui lui est donné, un nom qu’il n’avait pas eu durant sa vie terrestre, car c’est un nom qui appartient à Dieu lui-même. Ce nom, en grec, c’est Kyrios; on le traduit en français par Seigneur.
Ainsi, la clé de lecture de ce cantique se trouve en deux mots grecs : kénosis et Kyrios; appauvrissement et Seigneur. Ces deux mots s’avèrent aussi une clé de lecture pour toute la Semaine sainte que nous inaugurons : car du dimanche des Rameaux au Samedi saint, nous suivrons Jésus qui s’abaisse jusqu’à la mort; et de la Vigile pascale à la Pentecôte, nous célébrerons Jésus, le Seigneur de gloire.
Ce cantique résume admirablement notre foi. Qu’il soit aussi une prière accompagnant notre cheminement de la Semaine sainte. Et qu’il soit pour nous appel à suivre Jésus dans ce double mouvement : car ce n’est qu’en mourant à nous-mêmes que nous connaîtrons la vie en abondance.
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