samedi 20 août 2011

Une prière de louange

Méditation sur la deuxième lecture

21e dimanche du temps ordinarie, année A

Lire Romains 11, 33-36


Émerveillé, bouleversé, renversé… quel adjectif pourrait adéquatement exprimé l’état d’âme de saint Paul alors qu’il rédige ces quelques versets. Comme il lui arrive parfois, Paul suspend son argumentation pour s’élancer dans un moment de poésie lyrique. L’immensité du mystère qu’il médite semble l’emporter sur sa capacité de raisonnement, au point où la seule parole adéquate est une parole de louange.

Cela vous est-il arrivé d’être ainsi touché par le mystère de la vie? Une joie secrète vous a-t-elle déjà ébranlé à la vue d’un être aimé? Une paix profonde s’est-elle déjà infiltrée au cœur d’une rencontre? Une crainte sourde s’est-elle déjà manifestée devant la fragilité des personnes? Un désir insondable s’est-il déjà glissé au secret d’une nuit? Alors, vous avez fait cette expérience d’un moment qui coupe court à tout discours, à toute parole. Pour le chrétien, la chrétienne, ces moments-là sont une invitation à la prière. Mais une prière silencieuse, contemplative, qui nous permet de plonger dans le mystère qui nous entoure et de le goûter profondément.

Si le mystère est perçu comme écrasant, notre prière se fait demande. S’il est perçu comme exigeant, notre prière se fait pénitence. Gracieux? Alors nous sommes dans l’action de grâce. Merveilleux? C’est alors la louange qui s’élance.

C’est cette dernière attitude qui caractérise le passage de la lettre aux Romains que nous propose la liturgie cette semaine. Un passage où Paul reconnaît la grandeur de Dieu, l’immensité de sa sagesse, la profondeur de sa connaissance. Devant la réalité transcendante de Dieu, l’être humain se sent petit. Au point où certains philosophes ont affirmé qu’il valait mieux abaisser Dieu pour permettre à l’humain de s’élever.

Pourtant, avec Paul, nous découvrons que la petitesse ressentie devant l’immensité divine n’est qu’un point de départ. Le point d’arrivée, c’est l’élévation de notre être alors que nous entrons dans la louange. Comme le dit si bien une des préfaces de la liturgie romaine : « Nos chants n’ajoutent rien à ce que tu es, Dieu, mais ils nous rapprochent de toi. »

En louant Dieu, nous ne nous écrasons pas, nous nous élevons. Nous ne nous replions pas dans la médiocrité. Au contraire, tout notre être est emporté par la contemplation de la beauté de ce Dieu à l’image duquel nous sommes créés. Et sa lumière rejaillit sur nous, au point où nous pouvons refléter sa beauté au cœur du monde.

« À Lui la gloire pour les siècles des siècles. Amen. » Et à nous, la prière de louange.

lundi 8 août 2011

Un passage difficile

Une méditation sur la deuxième lecture

20e dimanche du temps ordinaire

Lire Romains 11, 13-15.29-32

Saint Pierre a dit des lettres de Paul qu’ « on y trouve des textes difficiles à comprendre » (2 P 3,16). La liturgie de ce dimanche nous en présente un très bon exemple! Voyons d’abord ce qui en rend la lecture si pénible.

La question dont traite Paul dans ce passage fait déjà problème, tant par sa complexité que par sa spécificité. Paul essaie de comprendre le rôle du peuple juif dans l’histoire du salut, en particulier après la résurrection de Jésus. Soyons francs : c’est là une question bien distante de nos préoccupations quotidiennes.

Ensuite, Paul développe son argumentation dans un style qui nous est étranger, le style rabbinique. Il cite des passages de l’Écriture qui ne semblent avoir aucun lien entre eux. Il fait des affirmations très fortes, pour ensuite les nuancer et les tempérer. Il joue avec des symboles, des métaphores, des ressemblances et des contrastes. Il se sert de techniques de raisonnement bien compliquées pour nous.

Si nous ne faisons qu’extraire une phrase ou l’autre de ces textes, sans chercher à les situer dans leur contexte, sans chercher à les replacer dans l’argumentation de l’Apôtre, nous risquons d’en détourner le sens. C’est pourquoi il est si important d’avoir un bon guide de lecture lorsqu’on lit la Bible. L’Église elle-même est le meilleur guide, car elle est appuyée par l’Esprit dans son travail d’interprétation et d’enseignement.

Revenons donc à notre texte d’aujourd’hui. Que pouvons-nous en conclure ? D’abord, une certitude : que Dieu ne revient pas sur sa Parole. Pour toi et pour moi, c’est ce qui fonde notre espérance. Dieu nous a dit son amour dans le Christ, et c’est un amour qui ne changera jamais en dépit de tout ce que nous pourrions faire.

Ensuite, une constatation : cet amour se révèle à nous comme miséricorde. En effet, personne ne peut mériter l’amour de Dieu. Paul divise le monde de son temps en deux groupes : les Juifs et les païens. Pour Paul, les Juifs ne méritent pas l’amour de Dieu, parce qu’ils n’ont pas reconnu le Messie. Les païens non plus ne méritent pas l’amour de Dieu, parce qu’ils n’ont pas reconnu sa loi dans leurs cœurs. Conclusion : personne ne mérite l’amour de Dieu.

Pourtant, nous sommes tous aimés de Dieu, Juifs autant païens. Et cet amour non mérité doit être accueilli comme miséricorde. La réponse de ceux et celles qui ont fait cette expérience de miséricorde, c’est d’en vivre à tous les jours et de l’annoncer à tous les peuples. Voilà la mission qui nous est confiée, voilà le défi que nous devons relever.

Paul est parfois difficile à saisir, certes, mais son enseignement est toujours important. Voilà pourquoi ça vaut la peine de chercher à le comprendre.

vendredi 5 août 2011

Peuple Juif, peuple choisi

Une méditation sur la deuxième lecture du 19e dimanche du temps ordinaire – Année A

Lire Romains 9, 1-5

La liturgie du dimanche qui vient aborde une nouvelle section de la lettre de Saint Paul aux Romains, les chapitres neuf à onze. Ils sont consacrés à une question très particulière, à savoir le statut du peuple juif dans la perspective chrétienne.

Le vingtième siècle a été témoin de l’aboutissement horrible de générations d’anti-sémitisme. En effet, le massacre de près de six millions de juifs durant la seconde guerre mondiale sous le régime nazi n’est pas arrivé comme un cheveu sur la soupe. Pendant des siècles, les chrétiens avaient entretenu des préjugés contre les juifs. On disait de ces derniers qu’ils étaient coupables de déicide, puisqu’ils avaient condamné le Christ. On les disait maudits par Dieu, condamnés à l’enfer. On les persécutait, on les obligeait à vivre dans des ghettos, on ne les considérait presque pas humains.

Pourtant, ce n’est pas ainsi que Paul voyait ses frères et sœurs du judaïsme. Dans l’extrait d’aujourd’hui, il rappelle tout ce qui fait la beauté de la religion juive : ils sont adoptés, choisis par Dieu; ils voient la gloire de Dieu habitant son temple à Jérusalem; ils continuent à vivre sous les alliances avec le patriarche Noé, le prophète Moïse et le roi David; ils suivent une loi juste et intègre; ils célébrent le culte du temple et de la synagogue; leur espérance est nourrie par la promesses d’un Messie. Pour Paul, leur plus haute gloire, c’est d’avoir donné la naissance à ce Messie, Jésus de Nazareth, lui-même un Juif.

Paul reconnaît tout ce que Dieu fait de beau et de grand dans le peuple juif, et Paul aime ce peuple. Il serait prêt à être retranché du Christ lui-même si cela pouvait aider ses frères et sœurs à reconnaître en Jésus l’envoyé, le fils de Dieu.

Paul nous donne ici un exemple. Il nous invite à rendre grâces à Dieu pour le peuple juif, nos grands frères et nos grandes sœurs dans la foi en nous rappelant tout ce que Dieu a fait pour ce peuple. Et il nous invite à aimer ce peuple, que nous connaissons si peu et si mal.

Comme l’avait fait Jean-Paul II durant le jubilé de l’an 2000, demandons pardon pour nos propres préjugés, nos propres ignorances à l’égard de ce peuple qui a tant souffert. Portons-le dans notre prière : il est toujours le peuple choisi, car Dieu est fidèle à ses choix. Juifs ou chrétiens, nous cheminons vers le même Royaume de Dieu. Il ne faudrait jamais l’oublier.