vendredi 28 avril 2017

"Ad limina" 7 - dernière conférence de la retraite

Le Père Ranchi nous a proposé, comme dernière conférence de notre retraite, une méditation à partir de la question que le Christ ressuscité posa à Pierre : "Simon, Fils de Jean, m'aimes-tu plus que ceux-ci?" (Jean 21) Voici quelques-unes de ses réflexions.


Une belle question. Une question exigeante.

Quand Jésus interroge Pierre, c'est moi qu'il interroge.

Au soir de notre vie, nous serons jugés sur l'amour.

Notons ce que Jésus ne demande pas. "As-tu compris mon message? As-tu compris la Croix? As-tu compris la mission que je te confie?" 

C'est comme si Jésus était en train d'évaluer sa propre mission : a-t-il réussi à faire naître l'amour dans le coeur de Pierre?

Dans cette scène, il y a un nouveau commencement. Il y a trois ans, ils avaient entendu l'appel de Jésus: "Suis-moi". Et voilà que retentit de nouveau l'appel. Comme si la foi était un perpétuel recommencement.

Celui qui a renié devient un ami. Celui qui avait été renié renouvelle sa confiance.

Tout commence avec la décision de Pierre d'aller pêcher. Comme s'il voulait retourner à son passé, avant qu'il ne rencontre Jésus. Ses compagnons aussi. Mais ils ne prirent rien. Nuit sans étoile, nuit amère. Ils ne peuvent pas revenir en arrière, faire comme s'ils n'avaient pas connu le Christ. Ils savent maintenant que, sans lui, la vie n'est que vent et vide.

Mais à l'aube, sa voix se fait entendre, peut-être ironique : "N'avez-vous pas de poisson?" Ils sont obligés de le reconnaître, sans lui, ils ne peuvent rien.

Il les invite à lancer leurs filets de l'autre côté de la barque, et leurs filets s'emplissent. Mais là n'est pas le miracle. Le vrai miracle, c'est Pierre qui met ses vêtements, se jette à l'eau et s'élance vers Jésus. Le vrai miracle, c'est Pierre qui se presse d'abandonner sa barque (malgré tous sa belle récolte de poissons) pour s'attacher au Christ.

Voilà la vraie sainteté. Non pas une absence de péché, mais un retour continuel vers la source de l'amour.

Le vrai miracle, c'est que les faiblesses de Pierre ne sont pas des obstacles, mais des occasions pour Pierre de renouveler son amour pour Jésus.

Avec Pierre, je peux répondre : "Oui, Seigneur, je suis ton ami. Je t'aime comme je peux, avec ce que je suis, avec mes faiblesses. Et tel que je suis, je te suivrai."

Jésus ne confie pas ses brebis à Pierre, le rocher, mais à Simon, l'ami! Non pas le nom de la fonction, mais le nom de l'intimité.

Au soir de notre vie, Jésus nous posera la même question: "Es-tu mon ami?"

...

Après la réponse finale de Pierre, Jésus peut retourner au Père, car il a laissé derrière lui la chose la plus importante : un peu d'amour dans le coeur de quelqu'un. 

Si on me demande si j'ai la foi, je réciterai peut-être le Credo. Mais dans sa première lettre, saint Jean affirme que les chrétiens se reconnaissent à leur foi non non dans une série de propositions, mais dans l'amour. "Mais nous, nous avons reconnu l'amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru!"

Qu'est-ce qu'évangéliser? C'est annoncer que nous croyons à l'amour, et inviter l'autre à aimer avec nous.

Il faut faire de l'expérience d'amour le lieu privilégié de l'évangélisation.

Le salut ne consiste pas dans le fait que j'aime Dieu, mais dans le fait que Dieu m'aime!

Et l'amour de Dieu n'est pas seulement "pour moi", mais "en moi". De sorte qu'il aime "en" moi, et "par" moi.

"Qui n'aime pas son frère est homicide," écrit saint Jean. L'indifférence tue. Rester à la fenêtre et simplement regarder rend complice du mal. 

,,,

La question que Jésus pose à Pierre, il me la pose. Et je ne dois pas l'esquiver. Ni les réunions ni les devoirs ne doivent m'en éloigner. Elle est essentielle. Je dois y répondre dans ma prière, mais surtout avec ma vie.

Et ma réponse ne doit pas être théorique ou intellectuelle, mais passionnelle! La Parole s'est faire chair et sang... ainsi, ma foi doit-elle se faire chair et sang.

Le fondement de la Loi, c'est "Tu es aimé." Et son accomplissement, c'est "Tu aimeras."

Voici, en conclusion, une photo du Père Ranchi prise avant qu'il ne nous quitte. Le souvenir de son enseignement et de son sourire ne nous quittera pas de sitôt.




jeudi 27 avril 2017

"Ad limina" 6 - Partie II

La septième conférence: une méditation sur la rencontre de Marie-Madeleine avec Jésus le matin de Pâques. La question de Jésus : "Femme, pourquoi pleures-tu?" Voici quelques réflexions du Père Ranchi.

C'est étonnant, les premiers mots du Christ ressuscité selon saint Jean sont : "Parle-moi de ta tristesse, de ta misère, de ton épreuve." C'est pour ces larmes qu'il est venu.

La question de Jésus ne cherche pas à arrêter les pleurs, mais à les accueillir. 

Le ressuscité n'éblouit pas, ne s'impose pas. Il se fait proche, intime. Il recueille les larmes dans ses archives éternelles (cf. le psaume 55). Ce ne sont pas nos péchés qui sont consignées dans les archives de Dieu, mais nos larmes.

Sur la croix, Jésus s'était arrêté à la souffrance du bandit. Au jardin, il s'arrête à la souffrance du disciple.

Le monde est un immense accouchement de vie nouvelle, à laquelle Dieu assiste comme sage-femme, plein d'encouragement, d'affection et de soutien. 

Christ glisse la puissance de la résurrection dans le monde par la fente de la blessure de la Croix, et désormais sa vie est unie à la nôtre.

L'indicatif divin devient l'impératif humain. Comme Dieu s'occupe de la souffrance humaine, ainsi doit faire l'Église, chacun de ses membres, chacun de ses ministres.

"La moisson est abondante" (Matthieu 9,37). Quelle est cette moisson? Celle des larmes du monde. Trop de larmes tombent sans être aperçues, sans être recueillies. Notre tâche, c'est de les cueillir.

Notre mission est double: annoncer la Bonne nouvelle et sécher les larmes.

La Bible n'offre aucune réponse à la question de la souffrance, et Jésus lui-même n'a pas expliqué comment sécher la source des larmes. Mais nous savons une chose: devant les larmes, Jésus n'a qu'une attitude, il se fait compassion.

Dans le récit du bon samaritain (Luc 10, 25-37), 10 verbes décrivent son action. Ce sont comme les nouveaux dix commandements. Voyons les trois premiers verbes, car ils nous tracent un chemin à suivre si nous voulons imiter Jésus.

Premier verbe: Le Samaritain vit les blessures de cet homme. Pour bien voir un jardin, il faut se mettre à genoux et l'explorer de près. Ainsi devons-nous regarder les personnes qui nous entourent, en nous mettant à genoux devant elles.

Deuxième verbe: Le Samaritain s'arrêta. Le monde ne se divise pas entre riches et pauvres, entre Occident et Orient, entre chrétiens et musulmans... La vraie division se fait entre ceux qui s'arrêtent devant la souffrance des autres, et ceux qui ne s'arrêtent pas! Nous sommes toujours à la course, nous risquons de passer mille fois sans rien voir, nous risquons de piétiner des trésors sans les voir.

Troisième verbe: Le Samaritain le toucha. C'est tout un défi pour nous, ce toucher. Toucher la blessure de l'autre, se faire intime avec la souffrance, c'est aussi se laisser toucher.

Voir, s'arrêter, toucher... Cela décrit Dieu, tel que nous le découvrons en Jésus. Et cela devient notre mission.

Dans le mystère pascal, toute blessure peut devenir une fente par laquelle se glisse la lumière de l'espérance. Et cela, en commençant par mon propre coeur.

Ci-dessous, une photo en gros plan des fleurs de vigne près de ma fenêtre. Le printemps est bien avancé en Italie!




"Ad limina" 6 - Partie I

Ce matin, méditation sur le pardon à partir du récit de la femme prise en adultère (Jean 8, 1-11), en s'arrêtant particulièrement à la question que Jésus lui pose : "Femme, où sont-ils? Personne ne t'a condamnée?" Voici quelques phrases glanées au long de la conférence du Père Ranchi.

Où sont-ils, ceux qui aiment accuser, abaisser les autres? Ceux qui pensent donner gloire à Dieu en éliminant ses enfants pécheurs? Ceux qui construisent les bûchers pour protéger la vérité? Ceux qui se servent d'un passage de l'Évangile, d'un discours d'un pape, pour lapide un autre? Est-ce que je fais partie de ceux-là?

Pendant des siècles, on a refusé d'intégrer ce texte dans les évangiles. La plupart des Pères de l'Église l'ont ignoré. Ce n'est qu'avec le Concile de Trente que ce texte a été reconnu comme canonique. C'est un texte scandaleux. Car Jésus va à l'encontre d'une loi de l'Écriture, en favorisant la personne.

Pour les scribes, la femme n'est pas une personne, mais une chose. On s'en sert, on la place où l'on veut. 

Cette femme n'a pas de nom : elle représente toutes les femmes soumises au pouvoir des hommes; elle représente toutes les personnes soumises au pouvoir des institutions, incluant les institutions religieuses.

Les fanatiques veulent sauver Dieu en tuant l'homme. C'est la tragédie du fondamentalisme religieux.

Mais dans le mystère de l'incarnation, Dieu nous apprend qu'il est du côté de l'homme. Il n'y a pas de conflit entre les deux.

Le but des pharisiens, c'est d'accuser Jésus. Ils accusent la femme afin d'atteindre leur vrai but, accuser Jésus. Mais Jésus refuse de se laisser provoquer. Il introduit plutôt une pause de silence. C'est souvent la seule réponse à la violence. 

Il baisse la tête. Pense-t-il au jour où il sera dans la position de cette femme?

Il écrit, mais on ne peut lire ce qu'il écrit. Dieu écrit encore aujourd'hui dans la vie des humains, mais savons-nous y lire ce qu'il écrit?

Jésus ne s'indigne pas de la faiblesse humaine, jamais; mais il s'indigne de l'hypocrisie des puissants, de leur sclérose cardiaque, de leur coeur de pierre. Il rejette les comédiens de la foi et les accusateurs. Il démasque leur hypocrisie avec peu de mots, mais des mots si interpellants qu'ils ne peuvent répondre. Des mots qui s'appuient non sur la théologie, mais sur la vie. Il leur révèle que la personne humaine, même pécheresse, jouit toujours d'une dignité inviolable.

Le corps humain est le sacrement de la communion de toute la réalité qui entoure la personne et fait partie de sa vie. 

Le danger des hommes d'Église, c'est d'être des experts du code, mais analphabètes du coeur de Dieu.

Une fois partis les hommes, Jésus se tourne vers la femme et lui parle... il est le premier à le faire. "Femme", dit-il, et non "Pécheresse". C'est le nom qu'il donne à sa mère, Marie, aux noces de Cana!

L'équilibre entre la règle et la compassion ne se trouve qu'en se plongeant dans une histoire humaine concrète, non dans une théorie.

La grandeur d'une civilisation peut se mesurer à son attention pour les plus petits.

Un demi-arc ne peut rester debout. Mais en appuyant un demi-arc sur un autre, on obtient la forme architecturale la plus forte. Nous sommes tous des demis-arcs. Seuls, nous ne pouvons rien. Avec l'autre, nous pouvons soutenir le monde. Jésus offre à cette femme un amour sur lequel s'appuyer.

Jésus ne lui demande pas si elle regrette son péché. Le remords ne l'intéresse pas. Il ne met pas le passé de cette femme au coeur de sa préoccupation, il lui ouvre un avenir. Le pardon n'est pas d'abord l'effacement du passé, mais la création d'un avenir. 

Le repentir ne vient pas avant le pardon, c'est le pardon qui le fait surgir.

Le berger ne prend pas la brebis sur ses épaules parce qu'elle avait commencé à revenir, mais justement parce qu'elle est prise dans les ronces. L'amour de Dieu n'attend pas notre conversion, il provoque notre conversion.

Le doigt de Jésus ne menace pas, il écrit sur mon coeur ces mots : "Je t'aime."


Pour Dieu, le bien possible que je pourrais faire demain compte plus que le mal que j'ai commis hier!

Ici, une photo des évêques du Québec célébrant l'Eucharistie ce matin.



mercredi 26 avril 2017

"Ad limina" 5 - partie II

La retraite des évêques du Québec continue cet après-midi avec une conférence sur la question de Jésus: "Combien de pains avez-vous?" Cette question, il la posa aux apôtres lorsqu'ils ont été confrontés à une foule qui n'avait pas de nourriture. Notre prédicateur, le Père Ranchi, nous invite à nous poser cette question de façon très sérieuse. Voici quelques-un de ses propos.

Certaines personnes meurent de faim. Pour elles, Dieu ne peut qu'avoir la forme d'un pain. Et surtout pas d'un pain métaphorique.

Face à la faim du monde, Jésus demande à ceux qui ont été nourris de nourrir ceux qui ont faim.

Une règle biblique: ce qu'est Dieu en lui-même devient pour l'être humain un commandement. Dieu est vivant: notre premier commandement est donc d'être des vivants! Et l'Église doit protéger la vie sous toutes ses formes. 

On apprend à vivre en regardant vivre nos parents. Les gens regardent vivre l'Église... apprennent-ils ainsi à vivre?

Le récit de la multiplication des pains est raconté six fois dans les évangiles. C'est dire son rôle fondamental pour les disciples du Christ. 

Avant de répondre à la question "Combien de pains avez-vous", Jésus invite ses apôtres à aller vérifier, à aller voir. Encore aujourd'hui, il nous demande "Combien d'argent avez-vous, combien de voitures, combien de joyaux, allez voir?" Il pose cette question à ses disciples mais aussi à l'Église. Il nous invite à la transparence, comme lui-même est transparent.

Trop souvent, l'Église est évasive sur les questions économiques, et cela blesse le peuple. Un clergé attaché à l'argent, un clergé pédophile, voilà les deux grands scandales de l'Église. Ce qui illumine et encourage, c'est une Église qui partage avec les pauvres. Ce que l'Église possède devrait devenir sacrement de communion.

Jésus donne du pain... il ira jusqu'à se faire pain pour ses disciples.

Nous devons l'imiter. Le geste ultime sera de se donner soi-même comme un morceau de pain pour faire vivre les autres.

Les cinq pains de l'Évangile font penser aux cinq petites pierres dans la main de David pour affronter Goliath... N'oublions pas qu'il venait de se départir de l'armure et de l'épée, car il ne pouvait marcher avec tous ces biens. Il s'est dépouillé, ne gardant que cinq pierres - et sa confiance en Dieu - et il a vaincu l'ennemi. Comme Église, nous aussi nous devons nous débarrasser de ce qui nous empêche d'avancer. 

Il ne s'agit pas de se mortifier, mais d'aimer la liberté. Le choix de David n'est pas par ascèse, c'est une nécessité qui s'impose s'il veut pouvoir agir. La plante aussi doit être taillée si elle veut porter beaucoup de fruit! Qu'est-ce que je dois émonder en moi? Qu'est qui doit être émondé dans l'Église?

Mère Teresa de Calcutta: "Tout ce qui ne sert pas alourdit."

Que puis-je faire avec mes cinq pains et mes deux poissons devant la faim du monde? Simplement les partager. Car le miracle n'est pas la multiplication du pain, mais le coeur qui se desserre et accepte de partager. Le miracle, c'est le pain qui passe de main en main. Si quelqu'un avait retenu le pain pour soi, le miracle se serait arrêté.

Le pain que je garde pour moi est une réalité matériel. Le pain que je partage avec un autre devient une réalité spirituelle. Le pain prend un autre sens!

Les gens pratiques disent: "Renvoyez-les." Mais Jésus ne renvoie personne. Jésus ne veut rien d'autre que d'être entouré de gens et de partager avec eux la nourriture. Et lorsqu'il est parti, il a laissé à ses disciples ce grand sacrement du rassemblement.

Ce n'est pas l'Église qui fait la charité, c'est la charité qui fait l'Église.

Il ne faut pas que les ministres de l'Église délèguent à d'autres le ministère de la charité, ils doivent en être les premiers pratiquants.

Voici une photo de la statue de Jésus qui nous accueille au Centre du Divin Maître.




"Ad limina" 5 - Partie I

Troisième jour de la retraite

Avec l'aide du Père Ranchi, nous continuons notre réflexion sur les questions de Jésus. Ce matin, nous nous arrêtons à celle qu'il a posée à ses apôtres, telle que rapportée par Matthieu dans son évangile (16,15-16) : "Et vous, qui dites-vous que je suis?" (Voir Matthieu 16, 15-16) Voici quelques réflexions que notre prédicateur nous a proposées, évidemment toujours repris dans mes propres mots.

Cette question est fondamentale, car tout dépend d'elle.

La question suscite la réflexion, et l'engagement. Il voulait que ses amis soient des penseurs et des poètes de la vie.

Jésus ne se contente pas d'une foi de convention, il veut une réponse personnelle.

Un poète reprendrait ainsi la réponse de Pierre: "Te rencontrer a été pour moi la plus belle chose de ma vie. Tu portes Dieu en ton coeur, au coeur du monde. Tu es le baiser de Dieu pour le monde."

Les gens ont peur d'être endoctrinés, d'être enfermés dans un dogme qui ne fait pas de place à la recherche personnelle. Ils ont peur de perdre leur liberté... comme des adolescents qui ne veulent pas dialoguer avec leurs parents, car leurs parents se présentent comme ayant déjà toutes les réponses. Ces gens ont peut-être raison. Peut-être devrions-nous prendre l'approche de Jésus, qui pose une question comme seul un amoureux peut la poser: qui suis-je pour toi? Jésus veut savoir si Pierre est tombé amoureux de lui!

Notre coeur peut être le berceau de Dieu. Il peut aussi en être le tombeau.

Jésus oblige Pierre à aller plus loin. Il vient bouleverser toutes nos conceptions de Dieu et de son envoyé. Il leur donne rendez-vous à la dernière cène et à la croix et au troisième jour. Ce n'est que dans ces événements que les disciples comprendront, car autrement le christianisme n'est que scandale et folie. C'est pourquoi, pour le moment, il leur dit de n'en parler à personne. Par après, une fois que l'expérience leur aura révéler la vérité, ils pourront parler avec justesse du mystère de Jésus.

Lorsque les gens voient des prêtres ou des évêques, ils voient des gens d'institution. Les gens ne sont pas intéressés par les institutions, mais par les personnes. Ils ne veulent pas nous entendre expliquer ce qu'enseigne l'Église, ils veulent nous entendre parler de notre expérience! 

Christ, ma douce ruine. Il n'est pas possible de t'aimer sans être transformé, sans mourir à moi-même. Je ne suis pas comme toi, mais je suis la possibilité infinie d'être comme toi... et cette possibilité me garde debout et me fait avancer. Je suis un Christ inachevé, en route.

La vérité n'est pas froide, elle est brûlante. On ne transmet pas la foi comme on passe un livre, mais comme on passe une flamme: quelque chose doit brûler en moi, et commencer à brûler dans l'autre.

Aux disciples, Jésus demandera : "De quoi parlez-vous?" Ils parlaient de qui était le plus grand. C'est peut-être inévitable: quand deux ou trois sont rassemblés, on se pose toujours la question de mon statut face aux autres. Mais le Christ veut que nous parlions de lui, car il est là, au milieu de nous, si nous sommes rassemblés "en son nom". Dans nos réunions, parlons-nous de nous, ou de lui?

Jean-Baptiste a dit, au sujet de Jésus : "Il faut que lui, il grandisse,et que moi, je diminue." Les ministres de l'Évangile doivent être infiniment petits, car ce n'est alors que l'annonce sera infiniment grande.


"Si quelqu'un veut me suivre, qu'il prenne sa croix." Mais la croix, pour le Christ, c'est l'amour qui va jusqu'au bout et qui donne vie. Prendre ma croix, c'est aimer comme lui pour faire jaillir la vie.

Je vous laisse cette photo de notre maison de retraite encadrée par une vigne en fleurs...


"Ad limina" - 4 Partie II

La seconde conférence du Père Ranchi en ce mardi, fête de l'évangéliste Saint Marc, porte sur la question de Jésus: "Que fera-ton si le sel perd sa saveur?" Voici une série de phrases que j'ai retenues et choisies pour vous.

3e entretien - Sel et lumière (Matthieu 5, 13-16)

Le sel - une question de goût; la lumière - une question de la vue.

Comme le sel ne nourrit pas par lui-même, la lampe n'est pas faite pour être regardée. L'Église doit être humble de la même façon, qui n'attire pas l'attention à elle-même, mais qui invite à regarder le monde pour y découvrir l'action de Dieu... ou pour voir où Dieu voudrait agir à travers nous, ses disciples.

Notre lumière, posée sur les autres, doit faire émerger ce qu'il y a de plus beau en eux. Notre sel doit faire apprécier ce qu'il y a de bon en eux.

Nous devons révéler et préserver ce qui est bon (le sel) et beau (la lumière) dans ce monde.

Le sel et la lumière sont un moyen, et non une fin en soi. Ainsi en est-il de l'Église: un moyen par lequel Jésus continue d'agir au coeur du monde. 

Je perds ma saveur...  

  • si j'attire l'attention sur moi plutôt que sur Dieu;
  • si je ne communique pas l'expérience de l'amour de Dieu;
  • si je ne rends pas les êtres libres et pleins d'espérance.

Dans le jardin d'Éden, la première parole de Dieu est une permission: "Tu pourras manger..." Le sens de la vie est une potentialité, une exploration des frontières du possible, une promesse - Dieu donne un décret de liberté.

Mais le serpent insinue: "Dieu n'a-t-il pas dit que vous ne devez pas..." Il réduit Dieu à un parent qui interdit. Dieu dit oui à la vie, le serpent dit non. 

Certes, Dieu fixe des limites, mais elles sont secondaires, dans une proportion infime: mille arbres sont à nous, un seul est dangereux. C'est le don qui porte la vie, non le commandement! "Si tu savais le don de Dieu." Quel est le don de Dieu? C'est Dieu qui se donne!

L'Église n'est pas un système où presque tout est obligatoire et le reste interdit. Nous devons être des instruments du possible!

Voilà pourquoi la liberté de Jésus fascine! Quel est le secret de la liberté? C'est la fidélité au Dieu de la vie. Cela te libère de tout le reste. "Cherchez d'abord le Royaume, tout le reste vous sera donné..."

Les gens qui s'approchent de nous y respirent-ils un air de liberté et d'espérance? Notre tâche est de donner un émerveillement nouveau à la vie. Entre le fondamentalisme religieux et l'indifférence religieuse, notre tâche est de ré-enchanter la vie.

Il ne suffit pas d'être croyants, il faut être crédibles. Car nous pouvons rendre l'Évangile incroyable si nous ne vivons pas de la nouveauté qu'il veut faire jaillir en nous.

Ce n'est pas de la façon dont tu parles de Dieu qui me révèle que tu connais Dieu, mais de la façon dont tu parles des choses de la vie."

La lumière n'a pas d'effort à faire, ni le sel. Leur nature est de briller et de donner du goût. Ainsi en est-il de quelqu'un qui vit en Dieu. Sa nature est de rayonner sa vie. Si nous vivons de sa liberté et de son espérance, nous serons de ceux qui rendent libres et qui donnons l'espérance.

"Votre mal, c'est que vous ne savez pas combien vous êtes beau." (Dostoyevsky, Crime et châtiment)

Comment notre lumière pourra-t-elle continuer à briller? Lire Isaïe 58... Éclaire les autres, et tu seras illuminé; guéris les autres, et tu guériras; vois les autres, et tu seras lumineux...


Jésus ne dit pas "tu es lumière" mais "vous êtes lumière"... c'est la communauté qui reflète l'amour du Christ. La rencontre produit la lumière. Notre lumière se nourrit de relations, de rencontres, de partages. 



mardi 25 avril 2017

"Ad limina" - 4

Quel conférencier que le Père Ranchi! Il nous fait découvrir des sens insoupçonnés des récits bibliques. Ce matin, par exemple, il nous a partagé une méditation sur le récit de la tempête apaisée, celle où les apôtres se trouvent avec Jésus dans une barque en pleine mer durant une tempête. Voici quelques phrases glanées durant la présentation du Père Ranchi. J'espère qu'elles vous feront interpellerons comme elles m'interpellent.

- Jésus dit aux disciples: "Pourquoi avez-vous peur? N'avez-vous pas la foi?" Peur et foi sont antagonistes. Des centaines de foi, (365 fois) la Bible dit "N'ayez pas peur." Une fois pour chaque jour de l'année. C'est comme le "bonjour" de Dieu. 

- Adam a eu peur de Dieu dans le jardin d'Éden, parce qu'il ne pouvait s'imaginer que Dieu serait miséricordieux. Avons-nous peur de Dieu aujourd'hui parce que nous ne pouvons pas nous imaginer un Dieu qui respecte notre liberté? Croyons-nous que Dieu soit jaloux de nous?

- Comment Dieu a-t-il répondu à la méfiance de l'humanité? En mettant sa confiance en l'humanité, en se faisant homme.

- La vraie réponse à la peur n'est pas le courage, mais la confiance.

- Jésus dit aux disciples: "Passons sur l'autre rive..." Les petites barques sont en sécurité dans le port. Mais elles ne sont pas faites pour cela. Notre place à nous n'est pas dans la sécurité d'une institution, même ecclésiale, mais dans la passion pour la haute mer, pour le large.

- Dans la tempête, une barque peut résister à condition qu'on ne cesse pas de ramer. Dieu ne nous sort pas de l'orage, mais nous soutient dans l'orage. Il ne nous sauve pas de la souffrance, il nous sauve dans la souffrance. Il ne sauve pas Jésus de la Croix, mais dans la Croix. Il ne nous donne pas des solutions à nos problèmes, il SE donne!

- La religion, c'est l'homme qui ramène Dieu à sa mesure. La foi, c'est l'homme qui se soumet à la mesure de Dieu. (Ce faisant, il trouve sa vraie mesure!)

- La foi se manifeste en trois étapes: j'ai besoin, je me fie, je m'abandonne.

- Dans Luc, Jésus calme la mer et les disciples sont émerveillés. Mais Jésus leur demande: "Où est votre foi?"... Dans le Dieu tout-puissant qui fait des merveilles? Ou dans le Dieu silencieux qui nous accompagne? Jésus n'a jamais appelé son Père "tout-puissant"... Ce n'est qu'après le Vendredi saint que les chrétiens peuvent comprendre avec justesse sa toute-puissance, qui n'est rien d'autre qu'une tendresse combative. Dieu ne peut pas tout, il ne peut que ce que peut l'amour! Sa puissance n'est pas celle du chirurgien, mais de la mère et du père de l'enfant malade qui, sans pouvoir guérir, compatissent et accompagnent sans relâche!

- Trois règles pour la mission de l'Église. Ne pas avoir peur. Ne pas faire peur. Libérer de la peur. 


- Pendant longtemps, l'Église a favorisé la stratégie de la peur (malheureusement), produisant une foi triste et faible. Il faut aujourd'hui choisir de nourrir la confiance, et passer de l'hostilité à l'hospitalité.

Entre les conférences, en plus de vivre de beaux moments de prière, nous nous promenons sur le terrain de ce superbe centre de retraite. Voici une photo d'un de mes coins préférés. Voyez comme ça favorise la contemplation!