Lire Éphésiens 5,
21-32
La deuxième
lecture que nous propose la liturgie en ce dimanche est un des passages les
plus controversés aujourd’hui parmi tous les textes de Saint Paul. Ces quelques
versets de sa lettre aux Éphésiens comprennent la phrase bien connue :
« Femmes, soyez soumises à vos maris. » À notre époque qui a vu
fleurir le mouvement féministe, mouvement qui a travaillé à faire accepter
l’égale dignité de la femme, une telle phrase est reçue comme une insulte. Et
prise telle quelle, c’en est une. Mais il faut replacer cette phrase dans un
triple contexte : contexte littéraire, contexte poétique et contexte
social.
Respecter
le contexte littéraire veut dire lire cette phrase avec ce qui la précède et ce
qui la suit. Ce qui la précède, c’est une invitation générale à tous les
membres de la communauté chrétienne à se soumettre les uns aux autres, par
respect pour le Christ. En autres mots, il faut que tous, hommes et femmes,
nous développions dans nos rapports les uns avec les autres une attitude
d’humilité qui nous fait vraiment écouter l’autre et le respecter comme si
c’était le Christ. Paul continue en appliquant cet enseignement général à
l’épouse dans sa relation avec son époux. Si on garde en tête que
l’enseignement général s’applique à tout le monde, la phrase choquante… choque
un peu moins.
Respecter
le contexte poétique veut dire comprendre le verbe « se soumettre »
comme un synonyme du verbe « aimer. » En effet, la poésie juive
aimait doubler les expressions en se servant de synonymes, par exemple :
« Que les nations acclament le Seigneur, que tous les peuples chantent son
nom. » On retrouve ce genre de dédoublement dans beaucoup de textes juifs.
Il ne faut pas chercher à établir un contraste entre « acclamer » et
« chanter, » mais plutôt à faire ressortir la ressemblance. En
appliquant ce principe, on trouve que la phrase « femmes, soyez soumises à
vos maris » est reprise en écho symétrique par la phrase suivante
« maris, aimez vos femmes. » Et pour faire comprendre ce parallèle,
Paul rappelle que le mari doit aimer sa femme comme le Christ a aimé l’Église,
c’est-à-dire en mourant à lui-même pour la faire vivre. N’est-ce pas là une
réalité identique à la soumission?
Enfin, il
faut respecter le contexte social. Paul n’a pas mis en question les structures
sociales de son temps, structures qu’aujourd’hui nous trouvons injustes. Il a
accepté tant l’esclavage et la dictature politique que le déséquilibre de
pouvoir entre hommes et femmes. Ce qu’il cherchait, c’était la façon de vivre
ces réalités selon la foi chrétienne. Depuis le temps de Paul, on a appris que cette
foi chrétienne inspire même à transformer ces réalités sociales : à faire
disparaître l’esclavage, à promouvoir la démocratie, à trouver le juste
équilibre entre hommes et femmes. Mais le souci de Paul demeure
d’actualité : trouver une façon de vivre ces réalités qui reflète la foi
qui nous habite.
En ce sens,
le message inscrit dans ces quelques versets garde toute son actualité :
le mariage chrétien doit s’inspirer de l’amour qui unit le Christ à son Église,
y puiser son sens, le refléter au cœur du monde, le transmettre aux autres. Il
faut proclamer ce message aujourd’hui plus que jamais, avec encore plus
d’insistance et de courage, au cœur même d’une réalité sociale qui n’est plus
celle du temps de Saint Paul.
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