dimanche 8 septembre 2013

Esclave, mon frère

Lire la lettre de saint Paul à Philémon

Paul a un ami, Philémon, qui est devenu chrétien grâce à Paul. Philémon a un esclave, Onésime. Ce dernier a fait tort à son maître et s’est enfui de Philémon (ce qui est contre la loi de l’Empire romain) pour se réfugier auprès de Paul qui est en prison. Paul l’accueille, l’aide à découvrir l’amour du Christ et l’emmène à la foi. Onésime, comme Philémon, devient chrétien grâce à Paul.

Mais Paul a un problème. La loi ordonne qu’Onésime retourne à Philémon, et Paul voudrait qu’Onésime obéisse à la loi. Mais il voudrait aussi qu’Onésime ne soit plus un esclave, mais un homme libre. Seul Philémon peut lui rendre la liberté civique. Alors, Paul écrit cette petite note à Philémon, pleine de tendresse et de tact. Il invite Philémon à pardonner son tort à Onésime et à l’accueillir non plus comme un esclave, mais comme un frère dans le Christ.

Pourquoi a-t-on gardé dans la Bible cette petite note, ce mémo personnel de Paul à Philémon? Elle est tellement courte qu’on en fait presque toute la lecture à la messe d’aujourd’hui. Mais sa brièveté et son ton amical cachent un enseignement qui est révolutionnaire. Car Paul y suggère que la fraternité qui s’installe entre les hommes et les femmes disciples du Christ est plus fondamentale que les distinctions sociales qui construisent les cultures humaines.

L’esclavage était une institution essentielle au fonctionnement de l’économie de l’Empire romain. À ce titre, il était structuré et protégé par la loi, mis en application par les autorités, accepté inconditionnellement par tous les citoyens. Mais Paul ose prétendre que l’Évangile peut servir à construire un autre type de société où chaque personne est reconnue dans sa dignité inhérente. À travers Philémon, c’est à l’humanité tout entière que Paul s’adresse.



La note de Paul à Philémon garde toute sa pertinence dans notre monde contemporain. L’esclavage existe toujours, sous des formes cachées, mais peut-être encore plus terribles que dans le passé. Il n’est plus protégé par la loi, il peut même être proscrit par la loi, mais il continue à faire ravage. La traite des personnes existe encore aujourd’hui. Des personnes -- femmes et enfants -- sont exploitées comme esclaves sexuels. Et que dire de tous ces hommes et ces femmes du tiers-monde qui travaillent pour une pitance dans des conditions horribles : cela aussi, c’est de l’esclavage.

Et nous, qui profitons de ce système économique, nous sommes les nouveaux Philémons. Paul nous invite à sortir de notre confort, à ne pas nous laisser endormir par notre richesse, à ouvrir nos yeux afin de reconnaître dans tous ces pauvres nos frères et nos sœurs.

Paul dit à Philémon au sujet d’Onésime : « Si tu penses être en communion avec moi, accueille-le comme si c’était moi. » Comment ne pas penser à la parole de Jésus : « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. »

L’Évangile contient une semence révolutionnaire qui pourrait changer le monde. Il en dépend de nous qu’il germe et porte fruit. 

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