Lire 1 Jean 4, 7-10
Quelqu’un m’a récemment envoyé une
question au sujet de l’amour inconditionnel de Dieu pour les humains: « Quand
quelqu’un commence à parler de cela, je ne fais qu’hocher de la tête, parce que
je ne veux pas partir de discussion. Mais je ne ressens pas cet amour divin
dont les gens parlent. Je ne sais pas à quoi cela peut ressembler. Ça ne sert à
rien de le comparer à l’amour familial, puisque je n’ai pas connu beaucoup
d’amour comme enfant. Dans le fond, mon problème, c’est que l’idée de l’amour
de Dieu ne provoque aucune émotion en moi. »
Peut-être mon amie croit-elle
intellectuellement dans l’amour inconditionnel de Dieu, mais elle est frustrée
de ne pas ressentir cet amour dans sa vie. Cela entraîne une question qui me
semble essentielle: la foi, est-elle fondée sur des émotions, ou sur des
convictions?
J’essaie de m’expliquer. Il m’arrive
assez souvent de choisir d’agir d’une certaine façon non pas parce que ça me
tente ou que j’en ai l’envie, mais parce que je suis convaincu que je dois agir
ainsi. Les parents le rappellent souvent à leurs enfants : « Tu ne
peux pas toujours faire ce que t’as le goût de faire! »
Qu’est-ce qui nous convainc lorsqu’on
ne ressent rien? Parfois, ce sera une réflexion intellectuelle. Parfois, une
saisie intuitive à laquelle nous nous fions. Parfois, une requête qu’on ne peut
refuser. Parfois, une valeur qui nous tient à cœur. Il y a bien des raisons qui
peuvent nous convaincre d’agir d’une certaine façon, même lorsque nos
sentiments ou nos émotions nous poussent au contraire. De fait, on devrait se
réjouir qu’il en soit ainsi. Si je décidais toujours en fonction de mes
émotions, je créerais un chaos autour de moi, car mes émotions tournent comme
une girouette : un jour, j’ai le goût de faire quelque chose; le
lendemain, la même chose m’ennuie profondément.
C’est pourquoi nos croyances
profondes ne peuvent pas être fondées sur des émotions ou des sentiments, mais
sur des convictions. Je crois en l’amour inconditionnel de Dieu, non parce que
j’ai ressenti cet amour-là, mais parce que j’en suis convaincu. Ce qui me
convainc, c’est l’histoire de Jésus, l’enseignement des Écritures, la vie des
saints, les écrits des sages de notre tradition… Tout cela me convainc de
l’amour inconditionnel de Dieu, que je le ressente ou non. C’est pourquoi je me
fie à cet amour, j’agis selon la dynamique de cet amour, même si je ne le
ressens pas.
Dans les fictions romantiques, les
sentiments mènent aux convictions. On commence par « tomber dans les
pommes, » ensuite on se met à agir en fonction de l’amour qui grandirait
pour l’autre. Dans la vie chrétienne, c’est un peu le contraire : mes convictions
font naître mes sentiments. Saint Jean l’affirme : « Dieu est amour…
Et voici l’amour : non pas que nous avons aimé Dieu d’abord, mais que lui
nous a aimés et a envoyé son Fils pour être le sacrifice d’expiation pour nos
péchés. » En devenant convaincus de l’amour de Dieu pour nous, nous
grandissons dans notre amour pour Dieu, dans notre amour pour tous ceux qui
cheminent avec nous. La conviction que Dieu m’aime fait grandir en moi mon
amour pour Dieu.
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