Plusieurs amis m'ont demandé si je reprendrais mon habitude de publier une réflexion quotidienne au sujet de mon expérience au Synode. Je ne sais pas si j'aurai le temps de le faire de façon régulière, mais j'essaierai. Je commence donc aujourd'hui en vous partageant une pensée qui m'est venue durant le chant du Je crois en Dieu à la messe d'ouverture ce matin, présidée par le Pape François en la basilique St-Pierre.
Nous chantions en latin, alternant avec les hommes de la chorale. Ceux-ci chantaient un verset sans accompagnement (très bien chanté, par ailleurs), et nous répondions avec les garçons de la chorale, accompagnés de l'orgue. J'étais assis avec les évêques qui participeront au Synode, et je les écoutais chanter (en chantant moi-même, naturellement). Il y en avait un qui commençait à répondre avant même que l'orgue ne donne la note; certains chantaient plus vite que les autres; l'un d'eux, au contraire, finissait toujours après les autres; certains étaient certains d'avoir le rythme juste et chantaient plus fort, afin d'imposer leur rythme aux autres; certains connaissent peu le latin ou le chant grégorien et se contentaient de murmurer... ou d'écouter. Pour un chant qui devait manifester l'unité de la foi de l'Église, c'était un peu comique d'écouter ce tiraillement vocal. Heureusement que nous chantions tous les mêmes mots!
Le Synode, c'est un peu ça. Près de 300 évêques rassemblés pour discuter d'une question fondamentale: comment aider les familles chrétiennes à vivre leur mission dans le monde d'aujourd'hui. Parmi ces évêques, il y en a qui veulent se précipiter, d'autres hésitent et veulent avancer prudemment. Certains sont certains d'avoir le bon rythme et veulent l'imposer au groupe en élevant la voix et en parlant fort. D'autres se sentent dépassés : ils écoutent, lisent, observent...
À cause de ma formation en chant choral, j'écoutais attentivement l'accompagnement de l'orgue et la voix des garçons durant le chant du Je crois en Dieu. Ce n'était pas évident: ils étaient situés de l'autre côté de la nef, et toutes ces voix qui m'entouraient rendaient difficile l'audition. J'essayais quand même de discerner le rythme du choeur et de chanter assez fort pour que ceux qui m'entouraient puissent le suivre. Par contre, je ne voulais pas chanter si fort que je briserais l'harmonie du groupe. Tranquillement, certains évêques autour de moi m'ont suivi dans cette recherche d'unison, et nous avons pu nous adapter au rythme de l'orgue et des garçons. À la fin, nous manifestions mieux l'unité de l'Église proclamant sa foi.
Dans le Synode, un seul peut nous donner le rythme juste: l'Esprit-Saint. Notre travail à nous, évêques, c'est de discerner ce rythme, cet élan vital qu'il veut nous transmettre. Ce n'est pas toujours facile. La rumeur du monde, la fébrilité de l'exercice, les êtres humains que nous sommes, marqués par nos cultures, nos expériences, nos tempéraments: tout cela rend difficile l'écoute commune de l'Esprit. Apprendre à s'ajuster à son rythme n'est pas évident. C'est peut-être pour cela que le Pape François nous a invités hier soir, dans une veillée de prière, à moins parler de la Sainte Famille et à plus la contempler.
Dans le mot ajuster, nous retrouvons la racine 'just-' de laquelle nous tirons le substantif 'justice'. La justice du Royaume, c'est précisément l'effort de s'ajuster au souffle de l'Esprit-Saint. Prions pour que les évêques puissent faire oeuvre de justice en ces trois prochaines semaines.
Bon, je pense que je vais émettre une note discordante :) Mais je crains qu'en parlant de la miséricorde-- une approche valide *dans le contexte catholique*, je crains qu'on perd la notion de repentance. Moi je sais ce que le pape François en voulant accompagner les couples remariés et les familles reconstituées. Il veut qu'on reste proche, qu'on essaie de les inclure dans notre communauté et qu'on leur offre l'aide de l'Église. Mais les médias et les catholiques non-pratiquants moyen n'ont pas d'idée du contexte de cette miséricorde. Pour eux "miséricorde" signifie "permissivité." Il ne faut surtout vehiculer cette impression. J'aimerais ça qu'on promouvoie la misericorde en tandem avec la repentance. Le pape François le sait lui que ça prend de la repentance, mais ce n'est pas du tout le message que les catholiques reçoivent dans le moment. Quand on leur offre de la miséricorde sans les responsabiliser, ce n'est pas miséricordieux, parce que le salut passe par l'acceptation de laisser agir Jésus dans notre coeur et donc faire en sorte que notre vie familiale correspond aux intentions du Père.
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